Valorisation Énergétique : alternative efficace ou dernier recours pour les déchets non recyclables ? 

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Les déchets non recyclables représentent un risque environnemental indéniable, tant est si bien que pouvoirs publics et industriels redoublent d’efforts pour que l’impact du traitement des déchets résiduels soit le plus faible possible. En effet, une élimination inappropriée de ce type de déchets peut entraîner des pollutions des eaux et des sols, des émissions toxiques, qui dégradent l’environnement et sont susceptibles de provoquer des problèmes de santé chez l’Homme. Face à ces problématiques, la valorisation énergétique des déchets non recyclables se présente comme une solution pertinente, capable d’en limiter l’impact environnemental tout en générant de l’énergie.  

Mais cette approche constitue-t-elle une véritable alternative durable ou simplement un ultime recours pour la gestion des déchets non recyclables ? Cet article explore ses enjeux et ses limites.  

Les avantages de la valorisation énergétique des déchets 

La valorisation énergétique permet, dans le respect de la hiérarchie des modes de gestion des déchets, d’exploiter les déchets considérés comme non recyclables et qui ne peuvent pas bénéficier d’une valorisation matière. 

D’ici 2028 selon la FNADE, plus de 30 TWh d’énergie thermique et de gaz pourraient être produits à partir de ces déchets, soit l’équivalent de six réacteurs nucléaires. C’est une source d’énergie non négligeable qui permet de s’ajouter au mix énergétique. 

Réduction de la mise en décharge et substitution aux énergies fossiles. Le principal avantage de la valorisation énergétique des déchets est la réduction du recours à l’enfouissement. Les combustibles solides de récupération (CSR), issus des refus de tri, servent ainsi à produire de la chaleur et/ou de l’électricité en complément des autres sources d’énergie. Cette énergie est essentiellement utilisée dans l’industrie et les réseaux de chaleur. 

(c) Déchets chiffres clés : L’essentiel Édition 2024. ADEME. 

En début d’année 2024, 19 projets de chaufferies alimentées par des CSR étaient engagés, représentant une capacité totale de 700 MW PCI et la valorisation de 1,385 million de tonnes de déchets par an. Ces chiffres correspondent déjà à 86 % des objectifs de production d’énergie installée pour 2025 (800 MW) et 92 % des objectifs de valorisation des CSR (1,5 Mt). 

Un complément essentiel à la valorisation matière. La valorisation énergétique constitue une solution indispensable pour les déchets ne pouvant être recyclés. Des procédés avancés, comme la pyrolyse et la gazéification, permettent d’exploiter ces déchets en les chauffant en absence d’oxygène. Ce traitement empêche leur combustion spontanée et génère des substances solides, liquides et gazeuses qui peuvent ensuite être converties en combustible, électricité ou chaleur. 

Grâce à ces technologies, la valorisation énergétique s’impose comme un levier stratégique pour réduire la dépendance aux énergies fossiles et optimiser la gestion des déchets difficilement ou non recyclables dans l’immédiat. 

Les limites de la valorisation énergétique des déchets 

Des émissions de CO₂ et de polluants atmosphériques. Bien que la valorisation énergétique permette de récupérer de l’énergie à partir de déchets non recyclables, elle reste une source d’émissions de gaz à effet de serre (GES), notamment de CO₂. L’incinération génère également d’autres polluants atmosphériques tels que les oxydes d’azote (NOₓ), les particules fines et les dioxines. Si les réglementations imposent des valeurs limites d’émission strictes, ces rejets restent une préoccupation environnementale et nécessitent des dispositifs de filtration très performants. 

Un risque de destruction de matériaux encore valorisables. L’orientation trop systématique de certains déchets vers l’incinération peut conduire à la destruction de matériaux potentiellement recyclables. Dans certains cas, un tri insuffisant ou une mauvaise gestion des flux de déchets peuvent empêcher la récupération de matières encore exploitables, réduisant ainsi les performances globales du recyclage. 

Un frein potentiel à l’économie circulaire. Le développement des installations de valorisation énergétiques des déchets peut décourager le recyclage en créant une solution de facilité pour la gestion des déchets. Si la priorité n’est pas donnée à la réduction des déchets à la source et à l’optimisation des filières de recyclage, il existe un risque de dépendance à l’incinération, au détriment d’une gestion plus durable des ressources. 

Une incitation à un commerce de déchets peu encadré. L’essor de la valorisation énergétique peut alimenter un commerce international des déchets avec des transferts de déchets vers des pays où les normes environnementales sont moins strictes. Cette pratique pose des questions éthiques et environnementales, notamment en matière de traçabilité et de gestion des polluants. Les règlements européens prévoient néanmoins une interdiction des exportations de déchets plastiques non dangereux vers des pays non-membres de l’OCDE.

La valorisation énergétique, bien qu’efficace pour traiter les déchets ultimes, ne doit en aucun cas être perçue comme une solution systématique ou prioritaire. L’enjeu majeur reste avant tout la réduction des déchets à la source, suivie d’une récupération et d’un réemploi optimisés. Il est essentiel d’améliorer la performance du tri et la qualité du recyclage afin de minimiser la part des déchets non valorisables. En maximisant le recyclage et en réduisant les taux de refus, nous pouvons limiter la quantité de déchets dirigés vers l’incinération et les centres de valorisation énergétique. 

Ainsi, la hiérarchie des traitements doit être respectée : réduire, réemployer, recycler, et en dernier recours, valoriser énergétiquement les déchets résiduels. C’est en adoptant cette approche que nous pourrons construire un modèle durable, conciliant protection de l’environnement et gestion efficace des ressources. 

Pour aller plus loin 

Valorisation énergétique des déchets. FNADE. La valorisation énergétique consiste à récupérer et à valoriser l’énergie produite lors du traitement des déchets sous forme de chaleur, d’électricité, de carburant. On peut distinguer deux sortes de valorisation énergétique : la valorisation par traitement thermique (incinération, co-incinération, pyrolyse et gazéification) et la valorisation du biogaz issu notamment des installations de stockage de déchets non dangereux et de la méthanisation des déchets organiques. 

Déchets chiffres clés : L’essentiel Édition 2024. ADEME. La série Déchets chiffres clés publiée périodiquement par l’ADEME s’adresse principalement aux acteurs de la filière déchets, en entreprises ou en collectivités, et constitue une référence statistique sur les déchets et certains volets de l’économie circulaire.   

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Les médias en parlent 

La nouvelle centrale Biosynergy valorise les déchets non recyclables. Journal des Entreprises. Projet mené par Suez en partenariat avec Vauban Infrastructure Partners pour un montant de 85 millions d’euros, la centrale Biosynergy de Gonfreville-L’Orcher (Seine-Maritime) va permettre de traiter 90 000 tonnes de déchets non recyclables par an pour produire de l’énergie thermique sous forme de vapeur d’eau. Le site alimentera le réseau urbain de chaleur du Havre et les industriels locaux.  

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