Plan de l’article
Les microplastiques sont définis comme des particules de plastique inférieures à 5 millimètres, pouvant atteindre quelques micromètres. Leur présence est aujourd’hui documentée dans la plupart des milieux terrestres et aquatiques. Longtemps associée à la pollution marine, cette problématique concerne désormais les sols, notamment agricoles.
Les travaux de l’INRAE (2024) indiquent que les concentrations de microplastiques dans les sols peuvent être supérieures à celles observées dans les milieux marins. L’ADEME rappelle que les sols agricoles constituent un compartiment important d’accumulation, en raison des pratiques agricoles et de l’épandage de matières organiques issues du recyclage des déchets.
Des sources bien identifiées : agriculture, composts, déchets organiques
Les principales sources de microplastiques dans les sols sont aujourd’hui connues :
- Les pratiques agricoles (films plastiques, paillages, enrobages de semences, irrigation) génèrent des résidus diffus au fil du temps.
- Les produits résiduaires organiques (PRO) : composts, digestats, boues de station d’épuration ou pulpes de déconditionnement – sont identifiés comme les premiers vecteurs d’introduction dans les sols.
- Les activités connexes (usure des pneus agricoles, filets, bâches) contribuent également à la dispersion de particules.
Selon le Rapport MICROSOF (2024), les PRO représentent environ 70 % de la contribution totale à la pollution microplastique des sols cultivés. L’étude ADEME 2025 a observé dans certains composts issus du tri mécano-biologique des concentrations pouvant atteindre 60 000 particules par kilogramme de matière sèche.
Une contamination avérée : résultats d’INRAE, ADEME et MICROSOF
Le projet MICROSOF, coordonné par l’INRAE et l’Institut de Recherche Dupuy de Lôme (IRDL), a révélé que 76 % des sols agricoles échantillonnés en France contiennent des microplastiques, principalement du polyéthylène et du polypropylène.
L’étude de l’ADEME sur les fertilisants organiques (2025) confirme cette tendance : sur 167 échantillons de composts et digestats analysés, 166 contenaient des microplastiques.
Ces particules peuvent persister plusieurs années dans le sol, migrer vers les horizons profonds et, dans certains cas, rejoindre les eaux souterraines.
Des impacts écotoxicologiques encore flous, mais préoccupants
Les connaissances sur les effets des microplastiques sur la faune et la flore terrestre restent limitées. Les premiers résultats issus de l’expertise INRAE-CNRS (2023) mettent toutefois en évidence plusieurs perturbations :
- modification de la structure du sol et de sa porosité,
- impacts sur la faune du sol (vers de terre, micro-organismes),
- transport potentiel de polluants chimiques ou biologiques,
- altération de certains paramètres de croissance des végétaux.
L’ANSES (2024) souligne qu’une meilleure compréhension des transferts dans la chaîne alimentaire est nécessaire pour évaluer les risques à long terme pour la santé humaine.
Quelles réponses possibles ? Leviers techniques, normatifs et politiques
Plusieurs axes d’action sont identifiés :
- Prévention à la source : réduction de l’usage des plastiques agricoles non recyclables ou non biodégradables, amélioration de la conception des films et paillages.
- Amélioration de la qualité des PRO : renforcement des exigences de tri en amont, suppression progressive des composts issus du tri mécano-biologique conformément à la loi AGEC (interdiction prévue avant 2027).
- Innovation technologique : développement de procédés de traitement et de filtration des microplastiques dans les chaînes de compostage et d’épuration.
- Cadre réglementaire : définition de seuils de présence en microplastiques dans les fertilisants organiques et intégration de cette exigence dans les normes européennes.
- Soutien à la recherche : suivi des flux, modélisation des transferts et évaluation des effets à long terme sur la fertilité des sols.
Ces orientations s’inscrivent dans les objectifs du Clean Industrial Deal européen, qui prévoit de renforcer la cohérence entre économie circulaire, traçabilité des matières recyclées et protection de l’environnement.
Vers une réglementation plus claire et mieux appliquée
Les données récentes confirment la présence généralisée de microplastiques dans les sols agricoles français. Si les effets écologiques et sanitaires restent à préciser, la nécessité d’un encadrement renforcé fait consensus parmi les institutions publiques et scientifiques.
L’enjeu consiste à établir une approche intégrée associant prévention, innovation et normalisation, tout en garantissant la qualité des matières organiques recyclées utilisées en agriculture.
Pour aller plus loin
Microplastiques présents dans les produits résiduaires organiques ADEME. Ces travaux établissent un état des lieux de la contamination en microplastiques dans les produits résiduaires organiques (PRO). Tous les PRO contiennent des microplastiques. Le PS est le polymère le plus présent suivi du PE, du PP et du PET. Les substrats d’origine agricoles sont les moins contaminés tandis que les PRO intégrant des produits issus d’un déconditionnement sont les plus chargés en microplastiques. Les impacts liés à ces apports aux sols sont encore mal connus. Les leviers pour abaisser la teneur en microplastiques sont la réduction des sources de plastiques, (emballages, …) et l’amélioration des systèmes de déconditionnement.
Projet MICROSOF : Recherche de microplastiques dans 33 sols français. ADEME. Le projet MICROSOF vise à établir les premières références nationales sur la contamination des sols français par les MP. Pour ce faire, 33 échantillons de sol issus du Réseau de Mesure de la Qualité des Sols (RMQS) (INRAe) ont été analysés.
IA au service d’une meilleure valorisation des biodéchets NextWaste. Les biodéchets constituent une ressource précieuse encore largement sous-exploitée. Ils regroupent les résidus alimentaires (comme les épluchures, les restes de repas ou le marc de café) ainsi que les déchets verts issus des jardins. En France, ils représentent plus de 46 millions de tonnes par an, selon l’Ademe.
Plastique, verre, métaux ou compostable, quels matériaux pour des emballages alimentaires durables ? NextWaste. Face à l’urgence climatique, à la saturation des centres de tri et aux nouvelles attentes sociétales, l’emballage alimentaire est au cœur d’un débat structurant. Derrière l’apparente simplicité d’un pot de yahourt ou d’une barquette de légumes se cache un défi complexe, entre recyclabilité théorique et réelle, bilan carbone, disponibilité des filières et cours des matières premières. Tour d’horizon stratégique des quatre principaux types d’emballage alimentaire.
Les médias en parlent
Microplastiques : analyse d’un emballement médiatique. Déchets Info. Selon Le Monde, l’AFP et plusieurs médias, une étude l’Ademe « publiée le 26 décembre » 2024 révèlerait la « présence quasi-systématique de microplastiques » dans les sols. Problème : l’étude en question date de février 2023, et elle n’est basée que sur 33 échantillons.