L’amélioration de la performance de tri des déchets valorisables est une composante essentielle d’une gestion des déchets efficace. Malgré des avancées réglementaires en termes de collecte (on pense notamment à l’extension des consignes de tri), et des avancées technologiques certaines (comme le tri robotisé) ces dernières décennies, une part significative de matériaux valorisables termine son cycle de vie dans les lignes de refus des centres de tri. Ces déchets recyclables, bien que pour partie incinérés avec récupération énergétique, représentent une perte économique et écologique majeure. En France, on estime que 15 % à 25 % des déchets résiduels en lignes de refus de tri sont (potentiellement) recyclables.
Face à ce défi opérationnel, la France porte un programme ambitieux de modernisation de ses centres de tri des déchets issus de la collecte sélective, dans le but d’en accroître à la fois la capacité (quantité traitée) et la performance (qualité de tri). Plus de la moitié des centres dédiés à ces déchets sont aujourd’hui en grande partie automatisés et capables de traiter divers types d’emballages, grâce à des technologies de pointe. Cependant, sans pilotage par des données fiables, l’automatisation ne garantit pas toujours une amélioration de la qualité du tri.
L’IA appliquée au suivi des déchets en temps réel, pour une amélioration de la qualité de tri
C’est pour cet impératif de performance que l’analyse précise du déchet par l’intelligence artificielle (IA) se présente comme une solution transformatrice. Depuis 2020, plusieurs entreprises développent des capteurs optiques d’analyse des déchets basés sur l’IA et tentent de changer radicalement la gestion opérationnelle, et stratégique, des centres de tri. Ces nouveaux systèmes permettent d’identifier avec précision et rapidité les différents types de matériaux, directement sur ligne de tri, avec d’excellentes performances de détection pour une séparation plus efficace des matériaux recyclables, une réduction générale des erreurs de tri.
Une IA entraînée sur des millions d’objets permet d’effectuer une analyse détaillée des déchets, sur près d’une centaine de sous-catégories, y compris ceux difficiles à trier comme le plastique noir ou les petites pièces. Cette technologie transforme les centres de tri en installations de valorisation avancées, où (presque) chaque déchet conserve son potentiel de ressource.
L’importance du contrôle qualité post-tri
Le contrôle qualité post-tri joue un rôle clé dans la réduction de la présence de contaminants dans les balles de matériaux recyclés, ce qui est crucial pour maintenir la valeur des matériaux recyclés sur le marché. Les recycleurs requièrent en effet des matériaux de haute pureté pour garantir l’efficacité de leurs processus de transformation. Les impuretés ou erreurs de tri peuvent entraîner des coûts supplémentaires en matière de retraitement et réduire la qualité du produit final. Ainsi, un contrôle qualité rigoureux, même après un tri automatisé, cherche à garantir non seulement l’intégrité des matériaux collectés mais aussi une valorisation financière optimale dans un secteur aux marges relativement fluctuantes.
Les centres de tri monitorent aujourd’hui leur performance de tri en effectuant périodiquement des campagnes de caractérisation manuelles, sur des échantillons plus ou moins représentatifs, afin de mieux comprendre la nature des déchets entrants, puis la performance des étapes de tri et ce jusqu’à la ligne de refus.
C’est précisement pour ce type d’application que l’analyse automatisée, en temps réel, de 100% des déchets entrants peut apporter une aide considérable au pilotage quotidien de nos centres de tri.
Intégration et collaboration dans l’écosystème du recyclage
L’intérêt de l’IA appliqué au tri des déchets ne se limite pas à optimiser les opérations internes; elle facilitera également la collaboration entre les différents acteurs de la chaîne de valeur. Il est en effet possible d’effectuer une intégration fluide des données générées avec d’autres systèmes et machines pour apporter des informations essentielles aux concepteurs de centres de tri, aux collectivités, et jusqu’aux fabricants d’emballages.
L’adoption de l’IA dans la gestion des centres de tri est en passe de marquer un tournant vers un modèle économique plus circulaire et respectueux de l’environnement. Elle promet un avenir où les déchets sont mieux valorisés et où l’automatisation intelligente s’accompagne d’une amélioration réelle de la qualité du tri et de la recyclabilité des déchets.
Conception d’emballages et matériaux recyclés : la responsabilité des entreprises en France
La gestion des déchets et le recyclage sont devenus des enjeux majeurs pour la société française. Les entreprises ont un rôle clé à jouer dans cette transition écologique, en particulier en ce qui concerne la conception des emballages et l’utilisation de matériaux recyclés. Dans cet article, nous allons explorer les nouvelles responsabilités des entreprises en matière de traçabilité et de tri, mais nous nous concentrerons surtout sur leur responsabilité grandissante à repenser la conception des emballages et à utiliser des matériaux recyclés
Pour aller plus loin
- Tri des déchets : comment fonctionne un centre de tri moderne ? Un grand plan national de modernisation des centres de tri des déchets est en cours. Il permet aux Français de trier l’ensemble des emballages. Mais comment fonctionne un centre de tri ? Lumière. Selon l’éco-organisme Citeo, la France métropolitaine compte 164 centres de tri des déchets en exercice. 60 centres de tri sont déjà en extension de consignes de tri à l’ensemble des emballages et sont pleinement automatisés. 15 centres de tri supplémentaires ont déjà été sélectionnés par appel d’offres pour entreprendre les travaux de modernisation. Pour les 104 centres de tri qui ne font pas encore l’objet d’une politique de modernisation, la taille et le niveau d’industrialisation sont variables. Certains d’entre eux devront se transformer et se moderniser pour accueillir les flux de l’extension, d’autres disparaîtront. L’Outre-mer compte 7 centres de tri : aucun d’entre eux n’est modernisé.
- De nouvelles règles pour ne plus enfouir de déchets valorisables : La réglementation destinée à réduire l’enfouissement et l’incinération de déchets valorisables est parue. Les producteurs devront démontrer la mise en place du tri. Les décharges devront contrôler la nature des déchets reçus. Un décret et un arrêté, publiés au Journal officiel du 18 septembre, mettent en application l’interdiction de stockage des déchets non dangereux non inertes valorisables, ainsi que la justification du respect des obligations de tri avant élimination. Les deux textes fixent un calendrier qui s’étale de 2022 à 2030, créent un cadre général et prévoient les dispositions applicables aux ordures ménagères résiduelles (OMR) et aux déchets des producteurs soumis à des obligations de tri.
- Citeo et Bourgogne Recyclage inaugurent le premier site français de surtri d’emballages plastiques : A Ruffey-Lès-Beaune (Côte d’or), Citeo et l’entreprise Bourgogne Recyclage ont inauguré, vendredi 19 janvier, le premier site de surtri d’emballages plastiques rigides en France. Avec une capacité de 30 000 tonnes par an, le centre bourguignon ouvre la voie à sept nouvelles filières de recyclage avec un objectif : donner des débouchés à des plastiques qui étaient jusque-là enfouis ou incinérés. Le premier site français dédié au surtri d’emballages en plastique rigide a été inauguré le 19 janvier à Ruffey Les Beaune (Côte-d’Or). Fruit du partenariat entre l’éco-organisme Citeo et Bourgogne Recyclage (E3R), une PME familiale intervenant dans la valorisation de déchets, l’usine présentée comme «un fleuron de l’innovation industrielle» est opérationnelle depuis le printemps 2023. 26 millions d’euros y ont été investis, dont 20 millions d’euros par Citeo et 433 000 euros par l’Ademe. «Ce site est une étape majeure qui permet de créer des débouchés pour nos emballages en plastique qui échappaient en partie au recyclage», a déclaré Jean Hornain, directeur général de Citeo lors de la présentation à la presse.